Critique de Keïra Delachenal

Bauryna salu est une fiction du réalisateur Askhat Kuchencherekov, imaginée à partir d’une tradition kazakh consistant à envoyer le premier fils d’une famille vivre avec ses grands-parents. On y suit donc le personnage de Yersultan, un jeune garçon vivant avec sa grand-mère dans une ferme du Kazakhstan. Il l’aide avec amour et patience à se laver ou à entretenir sa maison. Son quotidien est rythmé par le travail. Hanté par une photo de ses parents, il met chaque salaire de côté afin de pouvoir les rencontrer un jour.
Ce film nous raconte une recherche d’appartenance touchante et acharnée, une idéalisation des figures parentales avec lesquelles le jeune garçon cherche avec désespoir une ressemblance, devant son miroir.
Après la mort de sa grand-mère, le jeune garçon est recueilli par ses parents. Son souhait le plus cher se transforme peu à peu en une profonde désillusion. Il se retrouve à faire face à une mère peu présente et un père dur et exigeant. Il se mure alors dans le silence. Il trouve parfois refuge auprès des animaux de sa maison, ce qui nous laisse devant quelques scènes de pure tendresse contrastant avec la tension et le silence pesant au sein de la famille.
Le père, lui, joue un rôle ambigu. Il représente le plus souvent une figure d’autorité excessive mais parfois, il essaye malgré tout de faire une place à cet enfant qu’il n’a jamais connu. Il s’agit donc d’une relation père-fils complexe. Le récit met du temps avant d’atteindre le point culminant ou la communication et la tension explosent enfin, ce qui apporte une dimension nécessaire à ce film.
On découvre donc un monde fait de tradition, de non-dits, de pudeur et d’intimité qui nous transporte en plein dans la culture kazakh. Ainsi, c’est à la fois à travers un regard critique mais également une certaine attache émotionnelle qu’Askhat Kuchencherekov nous décrit son expérience, lui-même ayant vécu cette tradition étant enfant.