Critique d’Eugénie Garcia

Thierno Souleymane, réalisateur et personnage principal de l’intrigue, est à la recherche du film Mouramani. Entre mythe et légende, ce film est considéré comme le premier film réalisé par un Africain francophone. Tout le monde en a entendu parler mais personne ne l’a jamais vu. Thierno Souleymane part à travers la Guinée pour trouver ce film réalisé par Mamadou Touré. Durant son voyage, le réalisateur invite le spectateur à découvrir l’histoire difficile du cinéma guinéen. Après le coup d’état qui renversa le régime socialiste en 1970, la vague de totalitarisme emporte le 7ème art. Les cinéastes sont arrêtés et les pellicules sont brûlées ou enterrées. C’est alors la chute du cinéma en Guinée : les salles ferment les unes après les autres et la culture cinématographique n’existe plus. Sous les conseils des personnes qu’il rencontre lors de sa quête, Thierno Souleymane se rend en France où il espère en apprendre plus sur le mystérieux film de Touré. À Paris, il ne trouvera cependant rien.
Ce film est un vrai hommage au cinéma. On est ramené à la racine du cinéma, de la pellicule : le cinéma est une expérience cinématographique partagée et réfléchie. On questionne d’ailleurs l’industrie du cinéma actuel. La modernisation des moyens de diffusion est un sujet prépondérant dans ce film. Le spectateur est invité à se demander ce qui adviendra du cinéma, si détérioré depuis ses débuts. Thierno Souleymane le montre très bien : une pellicule, un film, une idée, une histoire, tous sont amenés à disparaître.
Dans sa quête, le réalisateur montre l’impact de la colonisation sur la culture africaine. Tout au long du film, les acteurs de l’industrie cinématographique ne cessent d’inviter Thierno Souleymane Diallo à continuer ses recherches en France. Se pose alors la question de la propriété du patrimoine culturel cinématographique. Voilà un très beau combat que défend bien le film.
Ce film est composé de focalisations différentes. On va d’abord suivre le réalisateur dans cette recherche qui lui tient tant à cœur. On le verra se démener tant bien que mal pour mener à bien sa quête. Sa persévérance et sa résilience touche le spectateur droit au cœur. La deuxième focalisation est interne. Elle nous est présentée directement à travers la caméra du réalisateur. Elle filme les interviews, le côté plus pragmatique, scientifique de cette recherche. Le mélange de ces deux points de vue crée le parfait documentaire.