Critique de Camilia von Wyss à propos du film My Stolen Planet, de Farahnaz Sharifi.

Le Black Movie, un festival de films indépendants qui regorge de films intéressants et engagés à Genève, compte parmi ses nombreux titres My Stolen Planet de Farahnaz Sharifi. Il s’agit d’un documentaire autobiographique féministe qui nous plonge dans la vie de Farahnaz, une réalisatrice iranienne née durant la révolution islamique de 1979.

Farahnaz Sharifi, n’est pas seulement la réalisatrice de ce film, mais aussi la scénariste, la monteuse et la preneuse de son. En effet, son long métrage aux allures d’un journal intime mélange des archives personnelles, mais aussi collectives, de films trouvés du passé avec des séquences du présent. Le film reconstruit l’histoire iranienne à partir de la rupture entre le passé et le présent. Il montre la transition brutale entre l’avant et l’après-révolution islamiste de 1979. Mais il relate aussi d’autres événements clés tels que l’accident d’avion du 8 janvier 2020, lorsque les forces armées iraniennes avaient abattu l’avion avec deux missiles provoquant la mort de 176 personnes à bord de l’appareil. Ce sentiment de dualité imprègne tout le film : passé et présent, archives personnelles et collectives, intérieur et extérieur, Allemagne et Iran

My Stolen Planet nous plonge dans l’histoire poignante de Farahnaz, qui est aujourd’hui en exil en Allemagne. Partie d’abord pour une résidence d’artiste, elle ne peut plus rentrer chez elle, à cause de ses actes militants. Elle voit sa « planète « , ceux qu’elle aime, son Iran natal libre et progressiste, lui être dérobée par le régime islamiste. On retrouve également ici une dualité avec le thème de l’immigration : vivant entre Berlin et l’Iran, elle ne se sent pas complète. De plus, elle explique avoir séparé sa vie en deux, sa vie « de l’intérieur », privée avec ses amis, une vie joyeuse qui est communiquée par de nombreux plans de gens qui dansent, et sa vie « de l’extérieur » dans laquelle elle doit se cacher sous un hijab, qui n’est « pas seulement un morceau de tissu », nous dit-elle. En effet, le hijab représente la réalité oppressive à laquelle Farahnaz et ses proches font face.

Ce film est un acte de résistance, contre le régime islamiste iranien, une histoire alternative de l’Iran, c’est un témoignage contre l’oubli d’un Iran où les femmes étaient libres. Le soulèvement des femmes iraniennes en 2022 marquera un tournant crucial dans sa vie et celle de son pays.